Lettre adressée à la mairie d'Arzon par MM Thoby et Foureau - 15 août 2011

Michel THOBY         Pierre FOUREAU
Ingénieur forestier         Architecte urbaniste

110 -122 Terrasses de Kerjouanno
56640 ARZON


Téléphones : 02 97 53 52 98 – 02 97 53 93 12
ARZON le 15 août 2011



Lettre en R.A.R.
à Monsieur le Maire d’ARZON

Pièce jointe pétition

Objet : projet de réaménagement de la plaine de loisirs du FOGEO




Monsieur le Maire,



     Lors de l’assemblée générale des copropriétaires de la Résidence Les TERRASSES de KERJOUANNO II, qui s’est tenue le 29 Juillet 2011 à la Maison du Port – à ARZON (56), la présentation du projet de réaménagement de la plaine de loisirs, a suscité de très nombreuses réactions des copropriétaires, ce projet de réaménagement jouxtant immédiatement les bâtiments des Terrasses de Kerjouanno 1 et 2. Outre l’action conduite parallèlement par le Syndic de la copropriété, nous vous adressons cette lettre à la demande des nombreux signataires de la pétition jointe des riverains et des promeneurs fréquentant ce site. Elle traduit leur très grande inquiétude et demande la suspension immédiate de ce projet, tant que les réponses aux questions soulevées n’ont pas clairement trouvé réponses.

     La plaine du Fogeo qui s’étend sur 9 ha constitue en effet un espace naturel remarquable d’une extrême richesse qu’il convient de préserver. Au demeurant, elle est couverte par certaines réglementations : classement notamment en ZNIEFF de type 2, loi littoral, etc... Le PLU a été invalidé par le tribunal Administratif de Rennes début 2011 pour vice de forme ; l’ensemble de la plaine de loisir était en zone Ndl, la bande boisée séparant les immeubles des Terrasses de la plaine de loisirs était classée en EBC, afin de mieux les intégrer.

     Le projet de réaménagement actuel prévoit de transformer complètement cette zone naturelle en espace artificialisé avec plantation de cassis, groseilliers, sureau, cornouiller sanguin, etc….
L’objectif est de reprofiler les Noues traversant cet espace et de les réalimenter par forage dans la nappe phréatique à 25m de profondeur. Pour permettre la mise en lumière de ces noues, il est prévu l’enlèvement de tous les arbres les surplombant ainsi que ceux susceptibles de leur apporter de l’ombre ou gênants le reprofilage. Des plantes d’eau douce seraient introduites dans ces noues afin de purifier l’eau naturellement, avec reprise de l’assainissement de tout ce secteur, et mise en lumière obligatoire.

     Un bulletin d’information de juillet 2010 faisait référence à ce projet mais sans évoquer l’abattage massif des arbres envisagé. Une réunion d’information limitée à quelques représentants des riverains, s’est tenue le 14 avril dernier en présence de Mr LABEYRIE, adjoint en charge de l’environnement. Des questions ont été abordées, les réponses apportées sont loin d’avoir convaincu les riverains :
Je vous en livre ci-après les principales questions qui motivent ce courrier :

- Quelle est la justification de la technique de ce projet qui préconise le forage dans une nappe d’eau douce à 25 m de profondeur dans un espace naturel protégé ? Quelles certitudes avez-vous des conséquences des forages sur l’équilibre actuel des nappes phréatiques par rapport à la dune attenante ? Une autorisation de la DREAL est obligatoire. A-t-elle été sollicitée et obtenue avant tout démarrage de ce projet et lancement des appels d’offres tel qu’il a été rendu public ?

- Le coût estimé de l’ensemble des travaux est par ailleurs selon vos sources de 1,7 M€, dont 300 000 € seraient financés par la Région Bretagne. Nous nous étonnons que la Région Bretagne puisse cautionner un tel projet compte tenu de la fragilité de l’écosystème de ce site, même dans le cadre du projet ECOFAURE.

- Les travaux prévus concernent des espaces naturels sensibles qui même s’ils ont été créés artificiellement il y a 30 ans, ont trouvé leur équilibre naturel au fil des années et constituent, avec la dune attenante, un écosystème fragile. Ils sont le prolongement d’une zone classée Natura 2000, l’espace en question étant classé en ZNIEFF. Enfin des espèces protégées comme les chauves-souris y ont été recensées. Quelle plus-value en terme de biodiversité est attendue de ce projet ? Les autorités administratives ont-elles comme nous le supposons, donné leur aval et délivré les autorisations requises ?
Il en serait ainsi selon vos déclarations, de la part des services de l’Etat concernant l’expert Natura 2000 de la préfecture, et le responsable des Espaces naturels sensibles du Conseil Général du Morbihan ?

- Le PLU ayant été annulé, l’ancien document d’urbanisme prévaut, le secteur en question est en zone NDj y compris la dune. Cette dernière devrait être classée en zone NDs et non NDl. Par ailleurs au titre de la jurisprudence en vigueur, la vocation d’espace boisé demeure sur le fond, malgré l’invalidation du PLU sur la forme. Le règlement en vigueur prévoit une zone naturelle excluant normalement l’introduction d’espèces végétales non autochtones.

La protection de ces ilots boisés constitue par ailleurs un écran vert dans une zone déjà fortement urbanisée qui s’artificialise d’année en année..

- Un abattage massif des arbres de cette zone (on parle de 400, soit une densité de 87% du préexistant et un volume nettement supérieur aux 50% du capital sur pied) est programmé avec modification considérable de l’environnement paysager et forestier. Cet abattage requiert une autorisation préfectorale concernant une collectivité pour une surface supérieure à 1ha. Après renseignement auprès de la DDTM, il apparait que cette autorisation n’a pas été sollicitée auprès du service de l’ETAT concerné. A la date d’aujourd’hui les arbres ont déjà été marqués d’un point « orange » par une entreprise le 2 août dernier, anticipant cette autorisation. Enfin des marquages supplémentaires ont été opérés par des particuliers indélicats à des fins sans doute personnelles. Une comptabilité précise des arbres à abattre a-t-elle été engagée comme cela doit être le cas. Ce secteur ombragé est très fréquenté par les promeneurs de transit (Remparts de Kerjouanno, village de Kermor) et par les familles des riverains. Les arguments développés pour justifier la coupe de ces arbres lors de l’entrevue du 15 avril sont pour le moins surprenants sinon aberrants : les pins maritimes ont des chenilles processionnaires : on devrait donc abattre tous les pins de Bretagne (à commencer par ceux du Petit Mont), les Robiniers ont des épines (mais qu’en est-il des rosa rugosa qu’on plante allègrement depuis peu), les peupliers argentés sont malades… Si l’envahissement des Noues par les saules depuis une quinzaine d’année peut être constaté faute de curage régulier par les services de la municipalité, pour le reste les essences forestières en place sont justifiées et ne méritent pas un tel jugement. Nous ajoutons que ces arbres assurent une protection contre le vent, les embruns ou l’ensoleillement excessif et constituent l’habitat naturel d’une avifaune et d’une microfaune. A ce titre les chauves-souris recensées sur le site y trouvent préférentiellement leur habitat. Qu’adviendra-il de cette espèce protégée en cas d’abattage ? Enfin nous vous rappelons que l’isolement brutal d’arbres ayant poussé en peuplements conduit immanquablement à leur dépérissement. Si le projet devait aboutir, la conservation d’arbres par bouquets de taille suffisante est obligatoire. Nous ne contestons pas le bien fondé de la gestion raisonnée de ce patrimoine arboré, mais dans le cadre d‘un plan de gestion global maintenant l’équilibre de cet écosystème.

- Le problème des eaux de ruissellement venant des Terrasses et de leur évacuation vers les Noues préoccupe également les copropriétaires des Terrasses. Nous espérons qu’il a bien été pris en compte comme le prévoit la réglementation du Code Rural. Le syndic de la copropriété des Terrasses de Kerjouanno 2 vous en fera état par courrier à part.

- Il est fait état d’études préalables réalisées par des cabinets spécialisés indépendants dont l’ODEM. Il serait très intéressant qu’une large communication des conclusions techniques de ces études, soit faite pour les personnes fréquentant ce site, compte tenu de l’ampleur de ce projet d’importance majeure pour la zone avec des implications multiples sur la biodiversité, sur l’eau et sur le milieu forestier, qui requièrent les autorisations administratives nécessaires.

Nous n’aborderons pas ici les fortes inquiétudes soulevées par ailleurs, par les rumeurs d’épandage des boues de dévasement issues du Port du Crouesty, sur la zone du Fogeo, propriété du Département, cette solution est considérée comme inenvisageable pour les riverains que nous représentons qui restent très vigilants sur l’évolution de ce dossier sensible.


Nous espérons que cette lettre retiendra toute votre attention et attendons les réponses aux questions légitimes posées par ce projet, qui nécessite une communication complète et transparente.
      Nous en référons parallèlement aux autorités compétentes sur le plan administratif et aux associations concernées pour nous assurer au nom de tous les signataires de l’opportunité technique de ce projet et de sa recevabilité administrative et juridique.

      Veuillez agréer Monsieur le Maire, l’expression de nos sentiments très distingués.



Michel THOBY
Pierre FOUREAU





Pièce jointe : pétition

Copies à :
     M. le Préfet du Morbihan –DDTM - Service Biodiversité Eau et Forêt
     M. le Préfet de la Région Bretagne – DREAL
     M. le Président du Conseil Général du Morbihan
     M. le Président du Conseil Régional de Bretagne- (à l’attention de M. Thierry BURLOT)
     M. le Président de l’Association Eaux et Rivières
     M. le Président de l’Association Bretagne Vivante
     M. le Président de l’association « Les amis du Fogeo et de la plage du Fogeo »
     M. le Président de l’Association « Sémaphore » à St Gildas de Rhuys
     M. le Président de l’Union de mise en valeur du Morbihan